Cette semaine, j’ai entendu à nouveau ces quelques mots qui font terriblement peur:
Malheureusement, je n’ai pas de bonnes nouvelles…
Le mois dernier, j’ai été au centre de recherches du CHUM pour rencontrer une spécialiste en génétique. La raison? Voir si je suis porteuse d’une mutation d’un gène qui aurait causé mon cancer. On s’attendait honnêtement à ce que ce soit négatif. Il n’y a pas de cancer du sein dans ma famille et mes deux parents n’ont jamais eu de cancer. Les chances que le test révèle une mutation d’un gène étaient plutôt faibles selon mon historique familial. Par contre, lorsqu’on se retrouve avec un cancer du sein à 32 ans, il faut envisager cette possibilité. On a donc reçu une panoplie d’informations sur les différents gènes et leurs impacts. Les deux plus probables dans mon cas étaient le brca1 et brca2, car ils prédisposent à un risque majeur de développer un cancer du sein à un jeune âge.
Puis, deux semaines d’angoisse plus tard, le téléphone sonne. Je me doute bien que c’est le centre de recherche. On m’avait dit 2 semaines et c’est un numéro inconnu. Je décroche et je sais tout de suite que les nouvelles ne sont pas bonnes. Ça se sent dans son ton de voix empathique… On m’annonce que les résultats ne sont malheureusement pas ceux espérés. Je suis porteuse du gène BRCA2.
Je verse quelques larmes au téléphone… On me laisse le temps de digérer la nouvelle, puis on m’explique ce que ça implique. Je sais déjà pas mal ce que ça implique, j’avais fais mes recherches. C’est pour ça que j’ai autant de peine. On va m’envoyer toute la documentation, je vais en parler davantage avec la chirurgienne et mon oncologue, mais on me donne les grandes lignes importantes.
Mon cancer est génétique et ce gène me met en danger pour plusieurs types de cancers, pas seulement pour le cancer du sein. Je vais donc devoir subir une double mastectomie, car le cancer a de fortes chances de revenir dans l’autre sein. On va aussi procéder au retrait de mes ovaires et de mes trompes, puisque j’ai un risque accru de cancer des ovaires. Mon pancréas peut vouloir ma peau, mais ça, on y peut rien sauf un suivi serré. Il y a aussi le mélanome à surveiller… Ça fait beaucoup de risques et beaucoup de suivis. Maintenant, ce n’est plus seulement mes seins qui mettent ma vie en danger, mais plusieurs organes de mon corps.
Malgré tout, ce n’est pas ça qui me fait le plus mal. Moi, je suis capable d’en prendre. Je commence à me faire à l’idée que dans le pire scénario, c’est la fin, même si ça fait mal d’envisager cette triste possibilité. Mais ce gène, il met ma famille en danger. Mes parents devront passer le test et le gène sera présent chez l’un d’eux, ce qui implique les mêmes risques que moi. Mon frère a 50% de chance d’être porteur et sa petite soeur s’inquiète pour lui… Mais le pire, ce qui me brise le coeur plus que tout, c’est les risques qui sont maintenant présents pour mes enfants. Ils ont 50% de chance d’avoir hérité de mon gène « défectueux ». Si c’est le cas, ils ont des risques très élevés de cancer du sein, des ovaires, du pancréas, de la prostate, de la peau… Est-ce que ma fille va devoir faire comme Angelina Jolie et subir une double mastectomie préventive à 25 ans? Ça, c’est difficile à encaisser. Faites-moi souffrir tant que vous voulez, mais ne touchez pas à un cheveux de mes enfants.
J’ai toujours été heureuse que mes enfants aient hérité de ma génétique. Les deux avec leurs yeux bleus ciel, le caractère fort de ma fille qui me rappel le mien, la sensibilité de mon petit bonhomme… Mais aujourd’hui, je souhaite plus que jamais que la génétique de mon chum aie eu le dessus sur la mienne. J’ai même un sentiment de culpabilité.
J’ai pleuré comme un bébé après ce coup de téléphone. Deux mois ont passés depuis l’annonce du cancer et même si certaines journées me sembles presque normales, d’autres sont beaucoup plus difficiles à vivre et me replonge dans la douleur vive du départ. C’est impossible d’expliquer les émotions qui nous submergent quand on se retrouve devant la triste réalité.
La vie est si fragile et peut basculer à tout moment, d’où l’importance de profiter de chaque seconde.
J’ai toujours cette grande peur au fond de moi. La peur de ne pas voir mes enfants grandir, de ne pas pouvoir être présente pour eux dans les moments difficiles ou lors des étapes importantes. J’ai peur qu’ils souffrent si je quitte trop tôt. Et maintenant, j’ai la peur qu’eux aussi vivent cette gamme d’émotions difficiles un jour…
Heureusement, la médecine évolue rapidement. J’ai espoir que pour mes enfants, d’ici 20 ans, on aie trouvé des traitements ou de meilleures solutions. J’ai espoir qu’ils aient la chance de recevoir un résultat négatif au test génétique. J’ai espoir que la vie sera un peu plus douce avec eux qu’elle l’est avec moi dernièrement. Quand j’étais jeune, ma meilleure amie et moi on s’est fait tatouer le mot espoir. Et bien c’est aujourd’hui que ce tatouage prend tout son sens…